Rencontre avec Chatila

16 septembre 2002, je suis dans un groupe d’Européens venus participer à la commémoration 20 ans après les massacres de Sabra et Chatila. Manifestation bruyante et plutôt bon enfant qui aboutit dans le Mémorial, petit champ clos avec quelques panneaux d’images des massacres. Nous sommes là peut-être un millier de personnes, il y a des prises de paroles, la nuit commence à tomber et c’est petit à petit que je réalise que nous sommes en train de piétiner le lieu même où sont inhumées les victimes. Là commence ma relation avec le camp de Chatila et ses habitants.
Jean-Yves Boiffier.

16th september 2002, I am with a group of European people who came for the 20th commemoration of Sabra and Shatila massacre. It is at the same time a noisy and peacefull demonstration arriving in the Memorial, a small closed field with some pannels showing images of massacre. Maybe we are here a thousand of people, there are some speeches, night begins to fall and, step by step, I realize that we are standing on the true place where the victims bodies are buried. That the beginning of my relationchip with Shatila camp and its inhabitants.
Jean-Yves Boiffier

dimanche 15 août 2010

Il y a deux ans disparaissait Mamhoud Darwich


Nous souffrons d'un mal incurable qui s'appelle l'espoir. Espoir de libération et d'indépendance. Espoir d'une vie normale où nous ne serons ni héros ni victimes. Espoir de voir nos enfants aller sans danger à l'école. Espoir pour une femme enceinte de donner naissance à un bébé vivant dans un hôpital, et pas à un enfant mort devant un poste de contrôle militaire. Espoir que nos poètes verront la beauté de la couleur rouge dans les roses plutôt que dans le sang. Espoir que cette terre retrouvera son nom original : terre d'amour et de paix. Merci de porter avec nous le fardeau de l'espoir.





Dans la tête et dans le cœur, j'avais ces mots que Mamhoud Darwich avait prononcés au Parlement International des Écrivains le 25 mars 2002 à Ramallah lorsque je suis venu pour la première fois à Chatila. Le poète s'en est allé il y a maintenant deux ans. Son chant est resté.




EST-CE EN UN TEL CHANT

Est-ce en un tel chant que nous ferons reposer le rêve sur la poitrine d'un chevalier
Auquel nous prendrons la dernière chemise, le signe de la victoire et la clé de la dernière porte
Pour entrer dans la première mer qui se présente ? Paix sur toi, compagnon du lieu qui n'a pas de lieu.
Paix sur tes pieds / les bergers oublieront les traces de tes yeux sur le sable.
Paix sur tes bras / la gélinotte passera de nouveau par ici.
Et paix sur tes lèvres / la prière sera célébrée dans le champ.
Que dirons-nous à la braise de tes yeux ? Que dira l'absence
A ta mère ? Qu'il s'est endormi dans le puits ? Et que diront les conquérants? Nous avons vaincu le nuage de la voix au mois d'août ?
Et que dira la vie à Mamhoud Darwich ? Tu as vécu, aimé, connu, et tous ceux dont tu seras amoureux sont morts ?
Est-ce en un tel chant que nous ferons reposer le rêve, emporterons le signe de la victoire et la clé de la dernière porte
Pour refermer ce chant sur nous ? Mais nous vivrons malgré tout car la vie est la vie.

Dans une traduction d'Abdellatif Laâbi, ce poème a été publié dans le recueil PLUS RARES SONT LES ROSES par Les Editions de Minuit en 1989.



Images réalisées par Ernest Pignon-Ernest et collées par l'artiste en Cisjordanie l'année dernière. Je vous recommande sa magnifique exposition actuellement à l'Espace Encan à La Rochelle jusqu'au 22 août. Si vous êtes à proximité, n'hésitez pas pour aller la voir.


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