Rencontre avec Chatila

16 septembre 2002, je suis dans un groupe d’Européens venus participer à la commémoration 20 ans après les massacres de Sabra et Chatila. Manifestation bruyante et plutôt bon enfant qui aboutit dans le Mémorial, petit champ clos avec quelques panneaux d’images des massacres. Nous sommes là peut-être un millier de personnes, il y a des prises de paroles, la nuit commence à tomber et c’est petit à petit que je réalise que nous sommes en train de piétiner le lieu même où sont inhumées les victimes. Là commence ma relation avec le camp de Chatila et ses habitants.
Jean-Yves Boiffier.

16th september 2002, I am with a group of European people who came for the 20th commemoration of Sabra and Shatila massacre. It is at the same time a noisy and peacefull demonstration arriving in the Memorial, a small closed field with some pannels showing images of massacre. Maybe we are here a thousand of people, there are some speeches, night begins to fall and, step by step, I realize that we are standing on the true place where the victims bodies are buried. That the beginning of my relationchip with Shatila camp and its inhabitants.
Jean-Yves Boiffier

vendredi 17 décembre 2010

Après le vote du parlement libanais, la situation sociale des réfugiés palestiniens s'améliore-t-elle ?

Nous avions reproduit l'article du Monde informant de l'amélioration des droits civiques des réfugiés palestiniens au Liban dans ce blog le 27 août. La situation n'a pour autant pas changé et les Palestiniens du Liban n'ont pas vu leur droits civiques progresser. Lorsque nous sommes allés à Göteborg au mois de septembre, voir le post du 22 octobre, nous avions interrogé Abu Moujahed à ce sujet. Il nous avait dit que tout cela n'aurait aucune conséquence positive pour eux et que cette nouvelle loi ne changerait rien à la condition misérable des réfugiés palestiniens.

Recevant le bulletin d'information de l'Association Française de Soutien aux Réfugiés du Liban AFRAN-SAUREL, association amie, nous en avons la confirmation dans un article assez complet de Francis Gras dont voici un large extrait :

"Depuis 1964, le travail des étrangers au Liban est subordonné à l'obtention d'un permis de travail délivré par le ministère libanais du travail, valable seulement pour un an renouvelable. Cette autorisation et le bénéfice de certains droits tels que l'indemnité de licenciement et la couverture par la sécurité sociale des frais de maladie est subordonnée au principe de réciprocité. Ce dernier conditionne l'application de ces droits pour les étrangers travaillant au Liban aux droits réciproques que les Libanais eux-mêmes se voient reconnus lorsqu'ils travaillent dans les pays dont ces étrangers sont originaires. On voit tout de suite ce qui en résulte pour les réfugiés palestiniens qui sont considérés comme des étrangers au Liban mais demeurent des apatrides et le demeureront tant que ne sera pas créé un Etat palestinien : aucune protection ne peut être accordée en vertu de ce principe à un travailleur palestinien.


De plus, l'exercice d'une profession libérale, selon la législation libanaise, ne peut se faire que dans le cadre de ce que l'on appelle en France "les ordres" (médecins, avocats, architectes, ingénieurs..) Or le régime intérieur de ces ordres exige de ses membres la nationalité libanaise depuis au moins dix ans. A ce titre, par exemple, les médecins palestiniens, même s'ils ont acquis les diplômes leur permettant d'exercer, ne peuvent le faire qu'auprès des centres du Croissant Rouge dépendant de l'OLP ou dans les secteurs sanitaires dépendant de l'UNRWA.


Jusqu'en 2005 les ministres du travail qui se sont succédés et qui disposent du droit de déterminer les professions exclusivement réservées aux Libanais avaient rendu inaccessibles aux réfugiés palestiniens 70 métiers. En 2005, le ministre du travail de l'époque, Trade Hamane, saisi d'une "empathie pour ces réfugiés" publie un mémorandum limitant à 20 le nombre de professions interdites en dehors des professions libérales toujours inaccessibles. Si depuis cette date, il est en principe possible à un Palestinien d'être salarié d'une entreprise libanaise pour une activité n'entrant pas dans le cadre des 20 professions, en revanche, ils ne peuvent toujours pas bénéficier des prestations sociales et médicales dont jouissent leurs homologues libanais quand bien même des cotisations sociales sont prélevées sur leurs salaires et versées aux caisses de la sécurité sociale libanaise.


Qu'apporte de nouveau la loi du 17 août 2010 ? En positif elle inscrit dans le marbre le mémorandum de 2005 en ce qui concerne l'accès à certaines professions et elle supprime le paiement par l'employeur de la taxe qui était exigée pour obtenir un permis de travail pour l'employé palestinien, taxe qui était particulièrement élevée. Mais, et là réside la principale inquiétude pour les réfugiés palestiniens au Liban, cette modification sera-t-elle suffisante pour accroître le nombre de permis de travail délivrés chaque année par le ministère du travail? Beaucoup de Palestiniens en doutent au vu des chiffres officiels qui apparaissent dérisoires : moins de 500 depuis 1977 et surtout en diminution constante depuis le mémorandum de 2005 (105 en 2007, 79 en 2008, 66 en 2009). Cette situation ne sera pas modifiée avec la nouvelle loi. En effet la délivrance du permis de travail à un réfugié palestinien est conditionnée à l'existence d'un contrat de travail avec son employeur qui soit conforme aux conventions notamment en ce qui concerne la nature de ce travail et le salaire versé ainsi que les cotisations sociales à la charge de chacune des parties. Très peu d'employeurs seront disposés à faire cette démarche. Cela revient donc pour les Palestiniens à continuer à travailler au noir pour des salaires nettement plus faibles que ceux accordés aux Libanais et avec pour seul et unique avantage de ne pas être en flagrant délit d'emploi irrégulier."

samedi 4 décembre 2010

Projection du film "Chatila, les femmes et les enfants"



Le film "Chatila, les femmes et les enfants" de Denys Piningre a été projeté le 17 novembre au cinéma La Clé à Paris. La salle, une centaine de place, était pleine et la projection a été suivie d'un débat en présence de Denis Sieffert, directeur de publication du journal Politis. La grande connaissance de la situation au Moyen-Orient de Denis Sieffert a enrichi les échanges et permis de mieux appréhender les questions complexes des événements au Liban qui ont abouti aux massacres de Sabra et Chatila les 15,16 et 17 septembre 1982.

Abu Moujahed, directeur du CYC
Abeer Kassem, coordonatrice du CYC
Ce film est le fruit d'un projet de l'association dont Denys Piningre est l'un des membres fondateurs. Nous avions souhaité disposer d'un film qui montrerait notre travail à Chatila et permettrait de développer notre action. La rencontre avec celles et ceux qui sont devenus les personnages du film a transformé le projet de Denys Piningre. Il a réalisé un film beaucoup plus ambitieux, décrivant la situation générale au camp et surtout permettant au spectateur de découvrir ces personnages, de s'en sentir proche et nouer un lien fort avec eux. Le résultat est que nous avons un beau film sur Chatila qui sera utile à toutes celles et ceux qui veulent mieux connaître ce que vivent les réfugiés Palestiniens au Liban. Il permettra certainement de remplir son objectif initial de contribuer au développement de notre association.